L’innovation sociale, un terme à la mode ?

L’innovation sociale a toujours existé, ce n’est pas un procédé récent, bien au contraire, seule sa dénomination semble assez nouvelle. Elle a une sonorité résolument moderne et nous invite à espérer des solutions brillant de mille feux, presque magiques. Or l’innovation sociale est, avant tout, une recherche de solution, laborieuse et créative, à un problème social. Cette recherche se réalise dans une démarche de partenariat où, il est fait constat d’un besoin et la recherche de réponse(s) s’effectue dans une dynamique collective et démocratique. Et c’est dans la proximité d’une ville, d’une communauté d’appartenance, que peuvent émerger de nouvelles inventions sociales se diffusant auprès d’un ensemble  d’actrices et d’acteurs qui se les approprient (Laville, 2014). Les projets d’innovation sociale sont autant d’expérimentations ayant pour vocation d’inspirer de nouveaux projets sur d’autres territoires.
Face à la crise financière, sociale, politique et géopolitique que nous traversons, l’innovation sociale s’offre comme une manière de repenser les rapports entre la société civile, les institutions et les instances politiques. Car, aujourd’hui, aucun de ces acteurs ne peut faire face, seul, à la complexité de ce monde accentuant davantage le clivage entre les « toujours plus riches » et les « toujours plus pauvres ». Plusieurs auteurs (Bouchard, 2012 ; Laville, 2014 ; Perroux, 1986) s’accordent à penser que l’innovation sociale est précieuse puisqu’elle génère de la croissance et des changements culturelles favorisant la modernisation des structures productives. Le CRISES (Centre de recherche sur les innovations sociales) définit l’innovation sociale comme « une intervention initiée par des acteurs sociaux, pour répondre à une aspiration, subvenir à un besoin, apporter une solution ou profiter d’une opportunité d’action afin de modifier des relations sociales, de transformer un cadre d’action ou de proposer de nouvelles orientations culturelles. » On voit donc poindre dans la notion d’innovation sociale une nouvelle manière d’agir et de produire une réponse face à un besoin, tout en visant un modèle économique pérenne.

L’Economie Sociale et Solidaire (ESS) est donc un acteur majeur de l’innovation sociale car elle s’inscrit dans le marché de l’économie ordinaire. A Genève, depuis 2003, il existe une initiative qui cherche à rassembler les différentes organisations sans but lucratif sous l’égide des valeurs de l’ESS. Il s’agit de la Chambre d’Economie Sociale et Solidaire (APRES-GE) qui, au travers d’une charte, rassemble 270 organisations sans but lucratif. Malheureusement, les instances politiques ne sont pas signataires de cette charte et force est de constater que les valeurs de l’ESS peinent encore à s’inscrire sur le plan législatif comme de véritables lignes de conduite des politiques publiques.

Alors qu’il existe des politiques publiques qui permettent à l’économie de s’appuyer sur des conditions-cadres gages de stabilité et d’une certaine prospérité, et que sont également mis en place des mesures financières et logistiques de soutien au démarrage des Start-up, il n’existe pratiquement rien pour l’entreprenariat associatif et les acteurs et les actrices de l’ESS. Par conséquent, il devient primordial que l’ensemble des acteurs et des actrices de l’innovation sociale puissent s’inscrire dans une véritable dynamique de partenariat avec les pouvoirs publics en garantissant un cadre législatif et des moyens adaptés aux projets relevant le défi de la transition socio-économique en cours.